mardi 26 octobre 2010

Deuil de bedaines et de bébés naissants



Ce soir, j'entendais Grande Ado causer avec l'Amoureux au téléphone, elle parlait de moi en ces termes: "MaMama". Cela donnait quelque chose comme: "j'aurai avec moi le cellulaire de ma maman, ma maman est au courant, ma maman voulait savoir si"... Intérieurement, j'ai ri en me disant qu'au fond, ils grandissent, mais pas si vite qu'ils veulent bien nous le faire croire. Et ce malgré les moments assez mouvementés qu'ils nous font vivre parfois, sur ce chemin de l'indépendance.

Jolie Sportive a certainement grandi d'un pied depuis une année. Les hormones ont façonné son corps de petite fille, le temps a allongé sa chevelure, et approfondi son regard. Elle sait prendre position, elle sait prendre des décisions, mais elle tient absolument à m'embrasser chaque fois que je quitte la maison, même pour aller au dépanneur. Je crois que cette enfant a toujours eu une peur viscérale de me voir mourir. Elle a encore besoin de ce rituel un peu superstitieux.

Petite Fleur sait maintenant gagner les toilettes toute seule, manger aussi, elle arrive presque à s'habiller de pied en cap. Elle cause comme une enfant de maternelle et sait tout son alphabet. Mais... elle se réveille encore la nuit pour être rassurée, comme un nouveau-né.

Quand à bébé Lutin, il rampe presque, s'assied longtemps sans faiblesse, a prononcé son premier mot: "viens-t'en". Mais lui, c'est encore un bébé, heureusement. Oui, heureusement. Il est si craquant! Chaque fois que mon coeur fond devant l'un de ses sourires si candides, je me demande comment j'aurais pu vivre sans lui, sans ce petit quatrième aux cheveux dorés, aux allures d'un archange descendu du ciel, si patient, si sage déjà, si aimant et conciliant.

Et chaque fois mon coeur se tord aussi à la perspective du deuil qui s'impose à moi. Plus jamais un autre bébé ne posera son regard sur mon visage de mère après celui-là. Leurs yeux contempleront sans doute un visage de grand-mère, éclairé mais vieilli. Et ils chercheront bien vite les yeux de cette autre femme, celle qui assure leur survie. Leurs petits bras, leur chaleur odorante, leur poids plume, véritables réconforts, véritables remparts à la grisaille et la fatalité. Tout celà est mien pour encore quelques mois, puis ce sera ... autre chose.

Comme disait l'Homme en me regardant pleurer sur l'une des publicité éducatives du gouvernement (...dans ce parc, il y a un enfant qui apprend à se faire des amis, et cet enfant c'est lui, le bébé de deux mois qui fait des imitations avec sa maman), il faut maintenant les élever! Pleurer comme une conne, je vous dis, à contempler toute la confiance dans le regard du bébé. Et pourtant j'en ai plein les bras! Moi et Petit mari fonctionnons à plein régime, constamment, pour que tout baigne. Il y a toujours un nez à moucher, un souper à commencer ou une brassée à plier!! Et de tels regards, nous en avons tellement reçus. Choyés nous avons été.

Je sens que ma famille est complète. Je pense que je peux sincèrement faire mon deuil. Mais qui a dit qu'un deuil c'était moins douloureux quand c'était raisonnable? J'aurai toujours cette nostalgie du petit être entièrement dépendant et extraordinairement attachant, et attaché. Il y aura toujours cet élan vers le cri, ce désir de consoler, cette larme avec les leurs, cette envie de lover ma bouche au creux des petits plis du cou, celle de humer les petits cheveux. Je suis une mère de profession (comme on dit dentiste de profession, etc).

Heureusement, ils ont toujours besoin un jour ou l'autre de maman. J'essuierai probablement d'autres larmes, et j'aurai toujours une bonne soupe sur le feu dans les moments plus difficiles. Malgré leurs longs bras, leurs grands pieds, au fond, ils seront toujours mes bébés.

14 commentaires:

Éléonore a dit…

"deuil qui s'impose à moi. Plus jamais un autre bébé ne " ça je connais bien...

ce que je trouvais merveilleux à avoir des enfants c'est que chacun est unique, qu'il ou elle sera différent, que le suivant aurait été différent également. Je n,aurais jamais pu m'arrêtter à un.

Manon a dit…

Je me faisais la remarque dernièrement que l'an passé à même date j'allaitais mon p'tit dernier en sachant que c'était le dernier...

Je pense qu'on vit ce deuil longtemps... je suis encore dedans en tout cas!

La Mère Michèle a dit…

Oui Eleonore, on se demande toujours de quoi aurait eu l'air le suivant! Parce qu'on a vécu l'émerveillement d'être agréablement surpris par chacun d'eux.

Manon: laissons-nous glisser dans la transition donc, ce deuil finira un jour, certainement.

En attendant, j'ai le coeur mou, et je profiiiiite!

Unknown a dit…

Je te comprends. Moi aussi je me surprends à me dire "Mais mon chum n'a pas eu son petit gars!" :) Mais bon, le fait d'avoir tellement peur d'avoir d'autres jumeaux, nous aide beaucoup à faire notre deuil ;)

Comme si le fait d'en avoir plein les bras, ça ne pouvait pas décourager lol

Éphée Lafée a dit…

Je le ressens ainsi moi aussi. Dur dur les "plus jamais". Même si tout ça fait place à autre chose... je veux le "autre chose" et "ça"!
C'est peut-être de la boulimie ;-)

Joan Durand a dit…

Oui mais une maman reste une maman toute la vie... et toujours ils reviennent, quand ils ont peur ou froid, même quand ils sont vraiment grands.

Caroline (La Belle) a dit…

Touchant ton message aujourd'hui. Nous ne savons pas encore s'il y aura un troisième, mais je sais que je n'ai pas vécu ma dernière grossesse comme une dernière. Mais on se donne le temps, le temps d'y réfléchir.

La Mère Michèle a dit…

J'ai changé mon titre. J'entendais maternité comme grossesse, mais la maternité, du moment qu'on a un bébé, elle est effective pour toute la vie, en effet.

La Belle: vous avez le temps! ;o) Moi je ne l'ai plus. Presque trente six ans, je ferme la boutique! :oP

Maman à bord a dit…

Que c'est touchant! Très beau texte!

Julie a dit…

Parce que j'en suis là, moi aussi, à me demander si nous nous lancerons pour Bébé4, j'ai retenu ton billet dans mon potinage du dimanche...

http://www.la-mere-est-calme.com/2010/10/quand-dimanche-rime-avec-potinage_30.html

La Mère Michèle a dit…

Merci Maman à bord!

Julie! J'ai répondu dans le billet!

:)

Unknown a dit…

Avec les enfants si grands, des deux côtés parental de la tribu, la question d'en avoir d'autres ne vient pas à l'idée.
Mais quand je regarde mon chum, quand je vois à quel point nous formons une équipe du tonnerre, je me dis que j'aurais adoré avoir des enfants avec cet ange cornu, si drôle et si présent et allumé !
Alors on se ballade main dans la main chez IKÉA en regardant les choses d'enfants et de bébés... Et on fait des plans de grands-parents... En souhaitant tout de même ne pas avoir à vivre ça avant bien longtemps.
...
Beau texte Michelle...
Ça me touche souvent dans les environs !!!!

Une femme libre a dit…

Je suis de celles qui ne voyait pas la fin de ce désir d'enfants. J'ai adopté la dernière à plus de quarante ans et même là, et même plus tard encore, si j'avais trouvé un conjoint qui le désirait, j'aurais sauté de nouveau dans la maternité sans hésiter. Et puis, ça s'est arrêté, tout d'un coup. L'appel du ventre était terminé, totalement. Tellement qu'aujourd'hui, je garde rarement mon petit-fils et quand ça arrive, ce n'est pas longtemps et je suis bien contente de le remettre à sa mère. Je trippe dessus bien davantage quand sa mère est là et que je n'ai pas besoin de m'en occuper pour vrai, juste de jouer et de faire la folle avec lui. Plaisir total. Quand la couche est pleine ou qu'il se met à pleurer, je le dis à ma fille et elle s'en occupe. On dirait que j'ai eu mon quota de bébés et de responsabilités familiales! ;o)

La Mère Michèle a dit…

Femme Libre: j'espère bien que finalement, tout s'arrête un jour...

Tu me donnes espoir!! ;o)

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