jeudi 25 septembre 2008

Coeur nomade



J'ai si souvent bougé mes pénates que je ne saurais dire d'où je viens.

Je sais bien que je suis née en Gaspésie, dans un tout petit village offert aux violences des marées. Mais depuis que j'ai 11 ans, je crois bien que je n'ai plus jamais habité un endroit (appartement) plus de trois années consécutives. Une ville ou une région, jamais plus de cinq ans. Et c'est le temps que cela cesse. Mon coeur de nomade est fatigué, je le sens bien. Il a tant d'amarres pendues, flottantes, parfois déchirées, qui pendent à son dos. Il porte en lui tant d'images de lieux aimés, de portraits tendres, de scènes inoubliables de ma vie, qu'il va éclater.

Je suis partie pour le collège, au début de la dizaine (et oui!) dans la région de Québec. Puis je suis revenue dans mon village une année, pour ensuite retourner dans cette grande ville qui a accueillie mes tous premiers amours, mes espoirs d'adolescence, le début de ma petite existence en tant que personne agissante et indépendante finalement! Grossesse monoparentale qui s'accompagne d'une autre année dans mon village, puis il y a Rimouski.

J'ai adoré vivre à Rimouski. Une belle maturité, une enfant à protéger et à élever (Grande Ado), une vie à vivre! J'en ai déjà parlé sur ce blog. Un lien me ramènera toujours sur les lieux de ma rencontre avec Petit mari, mon mariage, la naissance de JS. Mais par-dessus tout, quand je retourne en pensées à Rimouski, c'est un contact direct avec ma jeunesse, ma fraîcheur, et cet état d'esprit caractéristique de la vingtaine où l'on est rempli d'espoirs et de projets pour notre vie à venir, qui nous semble longue et pleine de promesse. J'ai toujours pensé que j'y retournerais un jour pour y vivre.




Ce qu'on a perdu nous semble toujours plus beau que ce que l'on a. C'est un air connu. Pourtant il faut se méfier de ces rengaines que l'on se chante intérieurement, pour se consoler, pour se conforter, pour se croire.

Vendredi dernier, j'étais sur la route en direction de cette ville chérie. C'est pour moi un pèlerinage chaque fois. Je vous mets quelques lignes sur mon état d'esprit, alors que j'écrivais dans l'auto:

Avaler les kilomètres
Et descendre dans le puit lumineux
Des souvenirs heureux

Au creux du ventre
Au fond du coeur
Au tréfonds de soi

Refaire la route
Défaire l'ancrage
Suivre l'ancienne voie
Le versant d'antan
La vue familière
Sous le bleu de la voute
Défilement de paysages

Mon âme nostalgique
Est en pèlerinage
Je reviens chez-moi
Où mon coeur n'a pas d'age

D'accord, c'est un peu maladroit. Pas un véritable poème, plutôt un cri du coeur. À la limite de la souffrance.

Et pourtant, j'allais découvrir ce jour là plus que je ne le croyais. Une délivrance sans doute.
J'ai refait avec les enfants tous les trajets familiers, montré du doigt les monuments, les rues, les écoles et autres commodités. Raconté, encore et encore. Et pourtant, nul moment ne s'est présenté où mon coeur aurait pu réclamer de rester pour toujours. Pas de nostalgie dévorante pour la vie quotidienne. Juste une tendresse pour les lieux.

À mon grand étonnement, j'anticipais le retour dans MA nouvelle ville, celle qui se trouve actuellement en fin de périple dans nos vies, après Montréal et sa couronne Nord. Serais-je enfin plus attachée au présent qu'au passé? Aurais-je enfin trouvé un équilibre qui me permette de réunifier, rafistoler tous les morceaux de cette vie éparse et créer enfin une réalité qui me satisfasse?

J'ai quitté Rimouski ce jour-là sans regarder derrière, comme je l'eus fait d'une colonie de vacances ou d'un camping à la fin d'un séjour. Y revenir avec plaisir, mais pour le moment, retourner à la vraie vie.

Un chalet dans le Bas-St-Laurent? Une tente roulotte pour y passer du temps! Voilà ce qu'il nous faudrait!

Pour ce qui est des racines? Je crois qu'elles sont en train de se former et qu'elles semblent solides, plus que celles qui ont poussé à d'autres endroits depuis quelques années. J'ai posé mon baluchon dans la ville de mon adolescence et il m'a fallu plusieurs mois pour décanter et aménager un espace mental pour notre famille au travers de tous les souvenirs que m'apportaient chaque rue, quartier ou monument appartenant à mon passé ici. Mais je crois que j'y touche, enfin.

Avec Petite Fleur qui est née ici, la Vieille Capitale est entrée dans le palmarès de mes lieux sacrés, alors qu'elle figurait déjà dans la liste des lieux habités. BB4 viendra parfaire ce tableau :o)

Couler des jours heureux, voilà ce à quoi j'aspire enfin.

6 commentaires:

Anonyme a dit…

Semble qu'on a tous le coeur nomade quand on vient d'en bas...et que retourner d'où vient rempli ce coeur de vent marin..ce vent qui nous fait nous déplacer à tout bout d'champ...c'est peut-être pour ça que je toff depuis 6 ans le même endroit!

La Mère Michèle a dit…

C'est vrai qu'étant nés par en Bas, on a dû d'office se déplacer pour étudier, se faire soigner même parfois, etc. Ça vous inaugure une vie en vire-vent ça! :O)

Véro a dit…

Je viens aussi de la gaspésie... Si tu savais comme je sens ton message dans mon coeur!!!

La Mère Michèle a dit…

:O)

zorotte a dit…

Ça m'a tout l'air que c'est l'effet des régions...Je me reconnais dans ce que tu dis, pour moi le retour aux anciennes amours était inévitable!
:-)

Symbari a dit…

Ah, moi aussi ça me touche directement...

J'ai passé 6 ans à La Pocatière, pour mes études, et j'ai longtemps pensé y rester. Le vent, le fleuve, les couchers de soleil! Tout est magique là-bas... J'y ai rencontré mon homme (qui, étrangement, venait de la même ville natale que moi, à plus de 10 heures de route de là-bas), nous y avons vécu de merveilleux moments et conçu notre Grand N.

C'est à 20 sem. de grossesse que nous avons décidé de revenir près de nos familles, le coeur un peu gros mais heureux de notre choix. Maintenant je me demande parfois si le destin nous ramènera un jour dans ce coin de pays pour de bon, où je me sens tellement chez-moi...

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